Dès l’entrée dans cette pièce aux dimensions réduites et à l’ambiance confinée, un sentiment d’incertitude vous gagne. Je ne dis pas « insécurité », mais bien « incertitude ». La pièce doit probablement répondre à une sorte de variable encore non identifiée, mais qui ne tardera pas à se manifester. Surprenante, il faut le craindre.
Il y a déjà ces lettres étonnantes qui forment le mot « bienvenue » et qui dansent sur l’un des quatre murs comme les flammes d’un foyer. D’ailleurs, il fait bon ici. Pour un peu, on se sentirait de retour à la vie intra-utérine (vous me voyez arriver, n’est-ce pas ?). Mais là n’est pas le plus important. Car à tout bien regarder, les lettres ne sont pas les seules à refuser l’état rigide qu’on s’attendrait à les voir adopter, comme n’importe quelle épitaphe docile. Les murs bougent ou, plus exactement, leur paroi se tend et se distend comme le ferait un thorax ensommeillé. La pièce respire doucement, profondément. C’en serait presque apaisant.
Pourtant, par je ne sais quel effet de contamination mentale, maintenant que j’ai bien remarqué cette étrangeté, je peine à maintenir mon équilibre : tout semble vouloir se mettre à danser autour de ma pauvre personne. Un peu comme lorsque l’on prend la mesure du vide, depuis un balcon, au huitième étage, ou depuis l’extrémité d’un éperon rocheux. On sent l’aimantation du gouffre et nos jambes nous refusent ce qu’elles nous offraient sans peine avant – un bon aplomb, de la stabilité, de l’équilibre –, elles se mettent à trembler dangereusement. Après quelques pas, il me faut bien me résoudre à accepter cette nouvelle horreur : le sol lui-même bouge… J’ai l’impression de marcher sur un trampoline. N’étant personnellement pas porté sur ce type de jeu, la sensation n’est pas agréable du tout. Le moindre de mes mouvements est amplifié. Autant s’asseoir (en position fœtale) et se calmer un peu.
À mieux observer les lieux, et il est tout de même curieux que je ne l’aie pas remarqué avant : il n’existe pas la moindre porte dans les cloisons qui m’entourent… Quand bien même il y en aurait une, je me garderais bien de la franchir : je suis nu comme au premier jour.
Cette cellule par laquelle j’arrive me donne le sentiment que c’est celle par laquelle tout un chacun doit arriver. D’ailleurs, je ne me souviens pas avoir été en quelque autre endroit avant. Aucun souvenir d’une vie antérieure à mon entrée en ces lieux. Il faut en conclure que je viens d’apparaître, que je viens de prendre vie, forme et conscience ici même.
Dès lors, il n’y a pas à s’étonner que le sol se dérobe. Me voici glissant vers mon premier cri. Dans quelle pièce nouvelle vais-je le pousser ?
Auteur : LukeArtur sous le pseudo « LukeArtur»