Mask as Mask
Mes jambes me portaient à vive allure. Une pensée m’habitait, un mot me guidait: fuir. J’avais eu mon compte d’émotions pour le restant de mes jours, et j’ai failli y passer une bonne centaine de fois. Sous mes semelles battantes, du parquet bien ciré. Sur les murs, des portes. Et des portes, encore des portes. Tordues, entrelacées, entrouvertes, cadenassées, hurlantes, folles à lier… Des portes partout autour de moi, qui m’enserrent dans leurs étreintes, qui me retiennent et qui m’étouffent. Je ne cessais de courir, accélérant à chaque seconde. Elles psalmodiaient, les portes, elles débitaient des mots aux consonances étranges, en faisant grincer sinistrement leurs vieux gonds. Elles chantaient pour me piéger, pour m’attirer dans leurs ventres, dans leurs antres. Puis je discernais une lueur verte, vacillante, dans le lointain du couloir: tout au fond. Elle papillotait légèrement, comme une luciole sous une cloche en verre. Enfin, j’arrivais à hauteur de la lumière, exténuée. Elle surmontait une porte bleue délavée, à la peinture écaillée. Je ne sais pas pourquoi, mais elle m’inspira confiance. Le mot « SORTIE » y était éclairée. La poignée de porte s’inclina sous ma main moite, le loquet couina, et j’entrais. Quand la porte bleue se referma sur moi, elle fut secouée d’un grand rire tonitruant, relayé par toutes les autres portes du couloir.