rouge-gorge as rouge-gorge
Je compris tout de suite la différence. D’abord, la pièce elle-même : le sol était constitué d’une étrange boue verdâtre, et les murs étaient un enchevêtrement de végétation humide et de fleurs luxuriantes. L’odeur étai douceâtre, écœurante. Et puis l’impression qu’elle dégageait, qui poussait l’oiseau en moi à s’enfuir au plus vite que pouvaient le pousser ses petites ailes.
-Fais très attention, me murmura Air à l’oreille, tout est empoisonné, ici. Ne touche à rien et respire le plus doucement possible.
Je ne perdis pas de souffle à lui répondre que j’avais compris. La progression était rendue difficile par le sol spongieux sous mes pieds. J’étais presque arrivée au milieu de la pièce quand je vis ce que j’aurais du comprendre depuis longtemps.
-Il n’y a pas de portes ! dis-je.
-Si, me répondit Air, là-bas.
Je regardais vers la direction qu’elle m’indiquait. Une poignée de bois semblait flotter dans le vide, derrière deux immenses roses qui paraissaient la garder. Par bonheur, elle n’était pas trop loin. Tandis que je marchai vers elle, je remarquai avec affolement que mes pieds s’enfonçaient de plus en plus. Je m’embourbai ! La panique me fit prendre une grande bouffée d’air qui me brûla la gorge. C’est vrai que l’air était toxique. Quand j’arrivai devant la porte, une voix sans âge s’adressa à moi :
-Que veux-tu ?
Les fleurs me parlaient !
-Je dois passer, vite !
Malgré tous mes efforts, je sentais que je m’enfonçai dans cette boue verdâtre. Me transformer ne me servirai à rien, bientôt je serais bloquée et je mourrais asphyxiée.
-Tu veux passer, dirent lentement les roses, très bien mais il y a un prix.
-Lequel ? haletai-je en sentant que la boue m’arrivait presque aux genoux.
-Ta compagne, déclarèrent les roses. Elle nous est semblable.
-Non !
Air et moi avions crié de concert. J’avais beau la connaître seulement depuis quelques (Heures ? Minutes ? Le temps est si étrange, au Château.), je ne voulais pas la perdre.
-C’est le seul moyen, dirent les roses.
Air semblait paniquée. Je l’étais aussi. La boue m’arrivait au milieu des cuisses, maintenant. Désespérément, je dis à Air :
-Dans mon sac, il y a une torche. Prends-là et passa-la moi, vite !
Elle s’exécuta. Je sortis ma boite d’allumettes de ma poche, allumai l’huile et appuyai de toutes mes forces contre la tige de l’une des roses. Un hurlement suraigu remplit la pièce. Les fleurs se débattirent dans tous les sens tandis que j’ouvrai la poignée qui donnait sur une autre pièce. Une douleur fulgurante envahit ma jambe gauche. En me retournant, à moitié dans cette pièce et à moitié dans l’autre, je vis qu’une épine était plantée dans ma chair. Puis je claquai ce qui de l’autre côté était un fin panneau en bois et m’écroulai sur le sol.