Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA PIÈCE POUR LAQUELLE JE NE TROUVE PAS DE NOM, VEUILLEZ M’EN EXCUSER
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LA PIÈCE POUR LAQUELLE JE NE TROUVE PAS DE NOM, VEUILLEZ M’EN EXCUSER

Aifé

-Aifé ?
-…
-Aifé?
Une main me secoue violemment. Je ne peux même pas parler, épuisée et gelée. Ma respiration est de plus en plus lente. Mon corps gelé de l’intérieur ne donnerait aucun signe de vie à quiconque tenterait de me parler.
-Non ! Aifé, tu ne peux pas être morte ! Ma sœur ne se laisserait jamais mourir !
Mes pensées sont floues. Les yeux fermés, je ne tente même pas de reconnaître la voix de la personne qui me parle.
-Aifé ! Reprends toi !
La personne me secoue violemment, sa main chaude me brûle. Soudain, elle s’arrête, et la personne à mes côtés se relève aussitôt.
-Aifé ! Attends moi ici !
Si j’avais pu parler, j’aurai dit à cette personne que de toute façon, vu que je ne peux même pas ouvrir les yeux je ne vois pas où j’aurai pu partir. Je sombre de nouveau, dans ce sommeil profond, tellement dangereux, ce sommeil qui est synonyme de mort pour une personne aussi gelée que moi.

Une main chaude caresse doucement mes cheveux. Mes pensées sont plus claires, et une intense source de chaleur près de moi me réchauffe peu à peu, dégèle mes cils. Je reconnais ce geste si familier, celui que mon maitre faisait avec tous ses disciples, lorsque épuisés, ils n’avaient même pas la volonté d’ouvrir les yeux au fond de leur lit. Mon frère a adopté ce geste, car il sait qu’il me réconforte. J’ouvre doucement les yeux. Je murmure.
-Théo ?
-J’ai cru que tu allais mourir. Qu’est ce qui t’as prit de partir skier sans combinaison ?
Il est moqueur. Comme à son habitude lorsqu’il me parle.
-J’ai… été piégée dans la glace.
-Ça explique pourquoi tu étais frigorifiée.
-Comment as tu su ?
Il se redresse, et me dit, avec le plus grand sérieux, ce sérieux qui est le sien dans ses activités professionnelles de traqueur.
-Tu as du faire tomber ton téléphone sur le sol. Une touche a du être actionnée, et tu m’as appelé. Comme tu ne disais rien, je me suis inquiété, et je suis allé méditer. Grâce à ça, je suis entré dans le Château dans mes rêves. Je t’ai sauvée.
-Merci…
-Au revoir, Aifé…
Je souris, et murmure.
-Penso a te.
-Addio.
Il s’évapore, tel un mirage laissant croire qu’il n’avait jamais été là. Mais le feu qu’il a allumé près de moi indique le contraire. Je regarde autour de moi. Je suis dans une pièce sombre, ronde. Mais vraiment ronde. La pièce est en réalité une sphère géante. Le feu est juste à côté de moi. Je regarde partout, et vois finalement une porte. Elle se démarque à peine sur le mur jaune pâle. La porte est une teinte au dessus. Je pourrais m’enfoncer dans le sol, mais je n’en fais rien. Cet épisode de ma vie m’a profondément marquée. J’aurai pu mourir dans le sol. Désormais, une peur profonde m’habite. Une phobie. Je crains de m’enfoncer dans le sol. Cette faculté qui était un atout devient un danger pour moi. Je crains de ne plus pouvoir me mouvoir, respirer, dans cette matière si familière, qui m’accompagne pourtant depuis le début de l’aventure. J’ai peur.
Ces mots résonnent dans ma tête. Un naga, qui a peur de s’enfoncer dans le sol, qui a peur, tout simplement. Mon espèce n’est même pas sensée ressentir d’émotions. Je commence à penser que le généticiens sont de plus en plus nuls. Après m’avoir crée, moi le rejet, l’erreur, la créature féminine qui n’aurait pas du naître, ils m’ont ajoutée le gêne de la peur.
Je me dirige vers la porte, en me jurant de ne plus jamais m’enfoncer dans le sol. Je murmure, encore sonnée.
J’ai une phobie… Si j’avais pu pleurer, je l’aurais fait. J’ai si peur…

Autrice : Jécrivaine, sous le pseudo « Jécrivaine »

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