Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LE BALCON AUX HORTENSIAS
LE BALCON AUX HORTENSIAS

LE BALCON AUX HORTENSIAS

Lorsque j’ouvrais la porte en bois, la première chose qui me frappa fut le vent. Il n’était pas violent, loin de là, c’était une légère brise, mais voilà des années que je n’avais pas senti le vent sur mon visage.

Malgré toutes mes prétentions, ma fierté d’aventurière, je m’étais, comme tant d’autres, laissée entraîner peu à peu dans les méandres du Château jusqu’à en perdre toute notion de temps, d’espace, et même à en oublier la raison de ma présence.
Voilà huit ans que j’avançais dans un couloir sans fin, trouvant toutes les portes fermées, la luminosité diminuant peu à peu ; et moi, inlassablement, avançant, espérant que le Château m’ouvre enfin une porte.

Alors, quand je parvins sur ce balcon, je prenais une grande inspiration, me sentant revivre, et c’est alors que je remarquais enfin ce qui m’entourait. Des hortensias. Partout. Bleus, roses, violets, foisonnants alors même qu’il ne paraissait pas y avoir une once de terre sur ce balcon de pierre.

Un chantonnement coupa ma réflexion. Quelqu’un était en train de fredonner Li Beirut. Je m’avançais doucement vers la source de ce bruit, et manquait de trébucher sur une femme accroupie, en salopette en jean maculée de terre, un sécateur à la main. Sans se tourner, elle s’interrompit et déclara :

« -Je vois que vous avez retrouvé votre chemin.

Perplexe, je répondis :

-Euh…bonjour. Vous êtes…une jardinière ?

Elle s’esclaffa, comme si l’idée était terriblement comique et ridicule.

-Moi, jardinière ? Ah non, non, pas du tout. Je suis informaticienne.

-Ah, répondis-je avec peu d’éloquence.

A vrai dire, je ne savais trop que faire de ce curieux personnage. Mais l’informaticienne n’avait visiblement pas besoin de moi pour faire la conversation, puisqu’elle continua :

-Vous voyez, Gary avait besoin d’une mise à jour, mais on oublie parfois que les danseurs n’utilisent que des parquets flottants.

Cette fois-ci, je restais sans voix. Elle se tourna vers moi, se redressant de toute sa taille, et je remarquais alors que sous sa casquette, ses cheveux étaient des serpents. Je me rappelais une vieille légende, une femme aux cheveux serpents dont le regard pétrifiait. Mais il était trop tard, ses yeux étaient rivés dans les miens. Elle prit mon visage de ses mains gantées, étrangement douce.

-Voyons, commença-t-elle. Tu as assez fui, les clés étaient dans ta poche.

Sans trop comprendre, je tâte ma poche droite. Je sens un trousseau de clés qui n’y était pas auparavant, j’en suis certaine. Elle continue :

-Allez, ce n’est pas un endroit pour toi, ta mère t’a toujours dit d’arrêter de faire des cabanes dans ses hortensias. »

Et sur ce, elle me lâcha, je sentis le sol trembler et le balcon commença à s’effriter. Sans jeter un regard en arrière, comme mue par une obscure certitude, je m’élançais vers les portes, qui ne s’étaient pas refermées derrière moi, et parvenait enfin à l’intérieur alors que le balcon s’effondrait et que le couloir alors sombre et déprimant s’illuminait d’une centaines de torches.

Je me retournais.

Les portes avaient disparu.

Autrice : Cloclosiku, sous le pseudo « Cloclosiku »

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