J’avais dû m’assoupir dans une précédente pièce car moi, Qwerty, me sentais désormais comme élancée et étirée, trop grande pour les bottes qui me semblaient autrefois si hautes. Et puis, je me sentais un peu lasse de l’exploration, comme prisonnière, comme piégée, par ces murs serpentant dans l’édifice.
La pièce dont je parle, cela dit, me sembla assez belle à regarder. Moulures, tableaux et statues, extrêmement symboliques et allégoriques. Des gens, femmes et hommes, nus et dotés d’attributs, animaux, végétaux et objets. Ce clinquant semblait dire : regardez, admirez, et écoutez. Un bureau, entre deux miroirs, et une chaise en velours vert comme mes vêtements qui devait porter un nom de roi, ce que les spécialistes en design savent sûrement mieux que moi.
Deux statues, une devant chaque miroir, portaient sur leur petit socle une légende : liberté et propriété. Toutes deux faisaient la moue, et un homme souriant entra dans la salle. Après l’habituel bonjour, je me rendis compte que le monsieur vêtu d’un costume et d’une cravate verte comme le velours me vouvoyait. J’avais bien grandi.
« Vous admirez donc les statues et symboles, constata-t-il.
-Difficile de ne pas les admirer, monsieur. »
Après quelques échanges courtois, il entra dans le vif du sujet comme on entre dans une pièce. Il voulait que je loue une pièce du château, et donc m’intégrer parmi sa clientèle. Le miroir scintillait. Il m’expliqua les nouvelles normes anti-passoire thermique, j’avoue ne pas connaître le rapport du château au droit, à la loi. « Voyez-vous ces rampes ? (Oui.) Il s’agit d’accès pour les personnes à mobilité réduite. Les normes protègent les plus faibles ». (Sur ce débat, je n’avais pas encore d’opinion).
Alors il me montra des photographies, des suites de chiffres censées être des prix. J’ouvris la fermeture à glissière de mon portemonnaie : non, ce ne sont pas quelques pièces, qui satisfont davantage les numismates que les financiers, qui m’aideront. Mais le cadre sourit en montrant les dents : je n’avais cas payer en plusieurs fois. Après tout, la chose était courante.
Et puis, il me remit une clé. C’est alors que je remarquais une chose : le miroir de la propriété ornait une porte. Et sur cette porte, il était aussi écrit : Bienvenue, cher locataire. Ça ne s’invente pas.
Ainsi, moi, Qwerty, j’avais repris l’exploration. Je voyais les pièces avec des yeux d’explorateurs, l’agent les voyait avec des yeux d’agent. Et moi aussi j’entrai dans le vif du sujet. C’est-à-dire que prenant la clé et poussant la porte, je me rendis alors dans la pièce louée.