Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA PIÈCE OÙ JE ME RAPPELLE
LA PIÈCE OÙ JE ME RAPPELLE

LA PIÈCE OÙ JE ME RAPPELLE

Enfant des mers as Enfant des mers

Je joue avec mon arc. Je le tourne dans tous les sens entre mes mains. Une, deux. Cinq. Trois. Les nombres se mélangent. Les mots s’enfuient. Je vois des filles, j’entends des voix. Je ne sais pas qui c’est. Je ne sais pas qui ils sont. Je ne veux pas savoir. Je m’en moque. Je veux pas. Je veux pas. Je veux pas…
Des images reviennent sans cesse. Des séries de flash qui se suivent. Un homme, au loin. Un arc. Une flèche encochée, prête à être tirée. Une épée. Une petite épée de pierre grise. Un sablier qui s’écoule lentement. L’épée qui frôle un bras. La flèche qui tombe. Puis l’arc. Un. Deux. Je cours. L’épée revient. Cette fois, elle touche le cœur. Du rouge. Un peu, beaucoup. À la folie. Elle s’écroule. Je la rattrape. Quelque part, un cri. Peut-être moi. Des yeux qui me regardent, suppliants. Des lèvres qui s’entrouvrent. Un gargouillis. Une bulle couleur sang. Elle dégouline sur ses joues, sur sa peau douce et blanche. Elle pleure. Ses mains qui me cherchent. Moi qui regarde, désespérée. Mes mouvements agités. L’épée qui me brûle quand je la saisis. Un râle. Un dernier regard, et puis soudain, ses yeux sont vides. Sa tête se penche tandis que son corps ne la soutiens plus. Je hurle. Le dernier grain tombe et retentit dans le silence.
Les pleurs dégoulinent sur mes joues. Je lève ma tête vers le ciel et pousse un cri de rage. Je hurle à la vie et à la mort, qui m’ont choisi moi et qui ont pris tous les autres. Je hurle à la lune, là-bas dans la nuit. Je hurle au monde dans lequel je vis, je hurle au malheur qu’est la mien. Je hurle.
Et puis je baisse ma tête et me relève. Je pousse doucement le corps de côté, là où personne ne lui fera du mal. Je regarde autour de moi. Des gens qui me regardent. Des inconnus aux visages familiers. Des amis que je ne reconnais plus, enragée comme je le suis. Un seul visage, un seul homme compte. Je le fixe. Si bien et si fort qu’il finit par se retourner et me regarder. Lentement, très lentement, je prends l’arc dans mes deux mains et repositionne la flèche. Je ne le quitte pas des yeux. J’approche la corde de mon visage. Une, deux. Je tire. La flèche vole, salut le mort à mes pieds, puis plonge réclamer sa vengeance. La pointe tourne, tourne, tourne. Lui ne bouge pas, fasciné. La flèche se fiche plante dans son cou. Il meurt instantanément. Et moi je crie à en devenir folle.
Un deux. Un deux. Un deux. Les battements de mon cœur s’envolent. Un deux. Tic tac. Je me lève et sèche mes lèvres. Un deux. Un deux. J’avance d’un pas, pousse une porte. Un deux.

Partager...

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

CHÂTEAU CENT MILLE

GRATUIT
VOIR