LA PIÈCE DU RÊVE ÉVEILLÉ
LA PIÈCE DU RÊVE ÉVEILLÉ

LA PIÈCE DU RÊVE ÉVEILLÉ

Pièce n°1824
Écrite par Jad de Salicande
Explorée par Jad de Salicande
Fait partie de la saga << < Chutes prophéties et assimilées > >>

Je suis dans le Cathedrall et je me demande ce que je fais là. Personne ne peut revenir dans le Cathedrall, enfin, je n’ai jamais entendu la moindre rumeur laissant entendre que c’est possible…

Je regarde plus attentivement et je vois un jeune homme, aux cheveux clairs et aux yeux noirs, s’avancer d’un pas légèrement hésitant dans cette pièce… Il a un sac à dos et… Mais c’est moi ! Ce jeune homme, c’est moi ! Qu’est ce qui se passe ? Je me rends compte d’un seul coup que je me vois d’un point de vue situé en hauteur, comme si j’étais un oiseau posé sur une corniche – ou un être humain en train de rêver, plus simplement.

Je me souviens alors que la dame à la robe émeraude m’a plongé dans un sommeil pour me permettre de me souvenir de tout ce qui m’est arrivé. Et toutes les aventures qui me sont arrivées dans ce Château me sont montrées en accéléré. Je revois les premières pièces que j’ai parcourues, les énigmes que je devais résoudre à chaque fois, je revois ma capture par Dark Vorda, le sauvetage du Maître qui m’a appris la magie, ma formation express en deux semaines… Je revois aussi mes différentes rencontres avec les ombres folles, et la pièce horrible où j’ai été victime d’un sort qui me transforme en sorte de poupée maléfique…

La succession d’évènements ralentit un peu. Je revois la rencontre avec Analayann et l’Ombre, les différentes pièces que l’on traverse ensemble, le poison qui envahit le corps de l’Amnésique… Je réentends l’appel au combat contre le Château, la première partie du combat, le sort d’arrêt temporel que je lance quand je me rends compte que notre ennemi n’a pas dit son dernier mot…

Puis la chute. La chute dans la Créature, dans cette substance gélatineuse qui entoure mon corps, le compresse, et ma bouche qui s’ouvre pour essayer désespérément d’avaler de l’air, alors que tout ce qui y entre n’est que substance visqueuse et désespoir.

Le tourbillon de sensations qui m’avait envahi s’arrête soudainement. Noir, je ne vois que du noir. Je marche dans une pièce immense dont les limites peuvent être atteintes en étendant mes bras, je ne sens rien mais pourtant une chape de plomb s’abat sur mes épaules, je ne marche plus, je suis à genoux.

Je ne comprends pas ce qui est en train de se passer. Je me sens épuisé, et je m’allonge au sol, dont la froideur transperce mon dos à cet instant.

Les forces me quittent petit à petit, et je me revois plus jeune, dans ce petit village au fond de la vallée, je revois le ciel bleu et la chaleur du soleil me caresser la peau, et je me sens fabuleusement bien. A vrai dire, l’idée de passer l’éternité à cet endroit me plait énormément subitement.

Douleur. Une brulure intense déchire mes poumons et je me sens tousser, et respirer, et j’entends deux voix qui crient « Il est vivant ! » avant que je reperde connaissance.

Maintenant, je suis au fond d’un cachot, seul. Il est tellement étroit que je dois replier mes jambes pour pouvoir m’allonger. Le sol est froid et humide, mais rien de tout cela ne m’intéresse car je ne souhaite qu’une chose : dormir.

Mon sommeil s’interrompt brusquement lorsque j’entends des hurlements familiers puis des cris « Ombre ? Ombre ? ». Annalayann ! C’est forcément elle. Je n’arrive pas à déterminer où est-ce qu’elle peut se situer mais elle doit probablement être enfermée dans un cachot elle aussi. J’essaie d’abord de me relever mais mon corps refuse de se redresser en s’aider uniquement de mon abdomen. Bon gré mal gré, en m’aidant de mes bras, de mes pieds et du mur suintant et froid autour, j’arrive à me redresser suffisamment. Je sens que cet effort m’a épuisé et je m’apprête à hurler son nom lorsque j’entends un vacarme du côté de son cachot. Immédiatement après, ma porte s’ouvre violemment et je vois la silhouette d’une femme. Son apparence n’avait rien de surprenant (enfin, pour quelqu’un qui était devenu habitué à toutes les formes d’êtres plus ou moins vivants que comprenait ce Château) mais ce qui m’intriguait le plus c’était la forme de la créature qui était juste derrière. Je n’eus pas le temps d’analyser cette chose, car la femme prononce : « Et bien qu’attends-tu ? Attaque, qu’on en finisse avec ce job » et une sorte d’insecte géant saute sur moi et j’ai l’impression qu’il m’étrangle avant de m’évanouir – une fois de plus.

Encore un réveil dans un endroit inconnu. Une nouvelle pièce humide, sombre et froide. Elle parait rectangulaire, et je peux en apercevoir les murs grâce à la pâle lumière de la pleine lune qui traverse un trou au plafond pour parvenir jusqu’au centre de la pièce. Serais-je au dernier étage du Château ? Ou à un endroit qui me permettrait d’apercevoir le monde extérieur ? Je me sens toujours extrêmement faible, et je n’ai pas la force de me relever pour essayer de voir d’où vient cette source de lumière. Je n’ai pas besoin de me donner cette peine – la femme était de retour, habillée d’une sorte de toge noire et avec des yeux d’un rouge sanglant. Mon attention se porte cependant immédiatement sur la créature voletant à côté d’elle, un énorme papillon de nuit blanchâtre et indescriptiblement dégoûtant. J’ai la nausée rien qu’à l’avoir dans mon champ de vision périphérique et la prise de parole de sa maîtresse me permet d’éviter de vomir ce qu’il y a dans mon estomac (sûrement de la bile, car quand est-ce la dernière fois que j’ai mangé dans ce Château ?) :

« Bienvenue, si je peux me permettre ce genre de vocabulaire. Bon, je ne vais pas y aller par quatre chemins : je suis chargée, avec mon amie la Phalène Horrifique, l’espèce d’insecte qui volète à côté de moi, de te torturer. Je n’ai rien contre toi – tu as l’air sympathique, et puis surtout assez mal en point pour ne représenter aucune menace, mais écoute, je ne fais qu’obéir aux ordres. J’espère ne pas te tuer mais je ne peux rien te promettre. Bref, bon courage, dit-elle. Puis en se tournant vers son animal de compagnie la phalène, elle murmure : Trouve la raison de sa puissance magique et toutes les informations qu’il possède sur le Château, les aventuriers qui le traversent et ceux qui pourraient présenter une quelconque menace ».

Sur ces mots, le papillon de nuit s’approche de moi. Plus sa silhouette grossit dans son champ de vision, plus la nausée m’envahit. Mes yeux commencent à voir flous car ils s’emplissent de larmes, et l’air s’humidifie autour de moi. Subitement, je me rends compte que je ne peux plus bouger. J’entends les battements d’ailes de la bête tout autour de moi, mais le son me parvient étouffé. Je souhaite relever la tête mais je ne peux pas. Je ne peux pas car je suis pris dans sa chrysalide. Je commence à paniquer. Je n’arrive plus à respirer car mon nez et ma bouche sont recouverts par ce cocon mouillé, gélatineux, et je sens qu’encore une fois je vais perdre conscience. Les derniers mots qui parviennent jusqu’à mes oreilles sont ceux de mon bourreau : « Je. Veux. Tout. Savoir »

Le nom du monde n’est que souffrance. Enfin n’était que souffrance car je ne fais que rêver tout cela. Au moment où je me souviens que ces évènements sont passés et que je suis en relative sécurité au moment où j’émets ces pensées, mes yeux s’ouvrent. Cette fois-ci, je ne suis plus dans un rêve. Je suis dans une pièce que je ne prends pas le temps d’examiner car une porte est située à un mètre de moi environ. Et elle commence à s’ouvrir avec un grincement suspect.

Le temps qu’elle s’ouvre me permet de faire un bilan succinct de ce qui s’est passé lorsque j’étais dans les cachots du Château : j’ai été torturé, tout simplement. Les bonnes nouvelles sont que je ne garde que très peu de souvenir de ces violences, car la Guérisseuse ne m’a pas rendu tous mes souvenirs (ou bien mon cerveau a décidé de faire un tri et de ne pas les conserver), et que je n’ai pas l’impression de garder de grandes séquelles physiques de cette période. Je me tiens debout, je n’ai pas l’air particulièrement essoufflé – je peux avancer !

Je me rends compte que la pièce dans laquelle je me trouve est sombre et je n’aime pas ça. Heureusement, un petit sort pour faire de la lumière et le tour sera joué ! Je dis la formule dans la langue des magiciens et je me plie en deux car je parviens à peine à tenir debout. Mes jambes tremblent, mes mains deviennent moites et je transpire comme si je venais de faire 10 aller-retours en courant ma maison et la mairie de Salicande.  Je lève les yeux et aperçois un faible clignotement lumineux dans la pièce qui s’éteint en quelques secondes à peines.

Je reprends mon souffle et je finis par soupirer. Tout ça pour ça, je pense, alors que l’inquiétude commence à grandir en moi. La dernière fois que j’ai fait de la magie, j’ai arrêté le temps pendant quasiment une minute. Là, je ne peux même pas éclairer une pièce ?

L’absence de bruit me coupe dans mes pensées. La porte a fini de s’ouvrir. Je ne vois pas ce qu’il y a derrière, mais je la franchis machinalement pour ne pas avoir à réfléchir aux implications de ce qui vient de se produire.

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