Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LE COULOIR AUX STATUES MOCHES ET A LA COLORIMETRIE DEREGLEE
LE COULOIR AUX STATUES MOCHES ET A LA COLORIMETRIE DEREGLEE

LE COULOIR AUX STATUES MOCHES ET A LA COLORIMETRIE DEREGLEE

Pièce n°1807
Écrite par Louve

— EST-CE QUE VOUS AVEZ CONSCIENCE DE LA QUANTITE D’EAU GASPILLEE ?

Hein ?

J’ai même pas eu le temps de comprendre ce qui s’était passé qu’il y a un mec habillé tout en vert qui est sorti de l’intérieur de la baignoire – ça veut dire que je lui ai craché dessus tout à l’heure ? Oups – et qui m’a attrapée par les aisselles et traînée dehors.

J’ai même pas eu le temps de lui dire merci. En même temps, j’ai pas envie. J’aime pas dire merci aux gens. C’est une norme sociale très surfaite.

— EST-CE QUE VOUS AVEZ CONSCIENCE DE LA QUANTITE D’EAU GASPILLEE ?

Il va me péter les oreilles encore longtemps celui-là ?

Il me traîne dans le couloir, face vers le plafond. Ça doit pas être agréable pour lui, mais pour moi, c’est très reposant : ça détend l’intégralité de mes muscles crispés par une douche maléfique beaucoup trop froide.

— EST-CE QUE…

— Tu vas arrêter de me gueuler dessus ? le coupé-je. Personnellement, J’APPRECIERAIS !

Il me lâche. Je regarde autour de moi. Y a des statues d’angelots un peu partout. C’est kitsch à souhait. Je sais pas si j’adore ou si je trouve ça juste… moche. Je crois que c’est la deuxième option. Mais c’est tellement moche que c’en est presque un parti pris artistique.

— Bon. T’es qui ? lui demandé-je.

Je m’assois par terre, sur le tapis bordeaux. Ça jure très fort avec la couleur dorée du plafond. Et avec le mur gauche : bleu turquoise bien flashy comme il faut. Et avec le mur droit : du marron couleur café. Huuuuuum. J’ai l’impression d’être enfermée dans un coffre à jouets.

Devant son absence de réponse, j’éclate de rire et je commence à farfouiller dans mon sac à la recherche d’Harold, mon sèche-cheveux portatif sur batterie externe rechargeable à la mocheté. Je suis dans le lieu idéal pour ça, il va fonctionner du tonnerre. Un paquet de mouchoirs (étonnamment secs, merci l’imperméabilisant du sac), un biscuit pour bébé, des croquettes pour chien – on sait jamais, ça sert toujours –, ma bouteille d’huile d’olive (surnommée Josette)… Ah, Harold. Je me réchauffe à l’aide de mon sèche-cheveux qui, comme prévu, fonctionne à merveille (je lui montre les anges et le mur turquoise, ça fait son petit effet, il s’affole vite)

Quand tout à coup…

— Mais ! crié-je. Tu penses que t’as l’droit d’mettre tes sales pattes dessus, ‘spèce de plante verte ?

Oui. J’ai été plus inventive en termes d’insulte. Je suis fatiguée. Et j’ai froid.

— Ce sèche-cheveux consomme énormément d’énergie ! Vous dépassez votre consommation horaire maximale d’énergie magique rien qu’avec l’activation de cette chose immonde !

Il le laisse tomber par terre. Heureusement j’arrive à le sauver. Mes yeux lui lancent des éclairs.

— Au nom du ministère de l’Eau glacée et de l’Energie magique, je vous dresse un double procès-verbal ! Ça vous fera…

Il écrit sur un morceau de papier.

— Quatre cent soixante-dix neuf virgule quarante-sept années de prison !

Euuuuuh ?! Il délire. S’il imagine que je vais aller passer j’sais même pas combien d’année en prison, il se met les doigts dans l’œil. Ouais, plusieurs.

— Bah non.

— Vous contredisez le fabuleux ministre de l’Eau Glacée et de l’Energie magique ?

— Mais ! J’me suis r’trouvée coincée sous une douche glacée qui m’a hurlé des trucs gentils pendant vingt minutes contre ma volonté ! J’suis même pas sèche ! Et il faudrait, en plus, que j’aille passer quatre cent machin truc années en prison ?!

Il semble réfléchir quelques secondes.

— Hum. C’est vrai, ce n’est pas l’idéal… Ce n’est pas assez pour tous vos crimes ! Je vais vous emmener… DANS LA SALLE DES PLANTES VERTES ABOMINABLEMENT ETHIQUES.

Oh non. Il recommence à crier. Il me reprend par les aisselles. Allez, c’est reparti…

— Et en plus, Harold, il fonctionne même pas à l’énergie magique, crié-je, pendant qu’il se remet à marcher, il fonctionne à la mocheté ! Tes statues, elles sont par-fai-tes pour lui ! Et c’est de l’énergie renouvelable à l’infini, y a pas de consommation horaire maximale avec ça. Oh, regarde, il s’active quand il est proche de toi ! C’est peut-être le costume…

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Un commentaire

  1. Ohhh mais super pièce, elle est très drôle ! J’adore tes inventions technologiques et ce fameux sèche-cheveux !
    Hâte de voir ce que va donner la peine prononcée par le Ministère de l’Eau Glacée et de l’Energie Magique 🙂 (Curieux assemblage, d’ailleurs !)

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