LE HALL MIROITANT
LE HALL MIROITANT

LE HALL MIROITANT

Pièce n°1852
Écrite par Sol'stice
Explorée par Loan

 Le contraste est… saisissant. Boue et brouillard sont remplacés par un carrelage de marbre, si propre que le plafond s’y reflète, et une lumière dorée qui pleut des riches lustres pendant à ce dernier. La bouche entrouverte, je tourne sur moi-même à l’entrée d’un hall éblouissant par la clarté dans laquelle il baigne, par les décorations toutes plus tape-à-l’œil qui l’habillent, par les miroirs qui recouvrent ses murs. Comment me suis-je retrouvé dans un lieu aussi luxueux ? Je remarque en face de moi deux immenses volées de marches symétriques qui s’enroulent vers une large porte à double-battant, et à leur pied un comptoir qui ressemble à un bureau d’accueil. Il y a quelqu’un là-bas !
 — Excusez-moi…
 Je m’avance dans sa direction, content de trouver quelqu’un qui pourra m’aider. À moins que ce ne soit l’un de ceux des murmures ? L’idée me freine un instant. Comme je n’entends rien d’autre que la musique qui semble provenir de la porte à l’étage – c’est là-bas que je dois me rendre ! – je répète :
 — Excusez-moi !
 J’obtiens cette fois un soupir agacé.
 — Chut ! Un peu de respect et de silence, s’il vous plaît. Pas la peine de crier, déjà qu’avec votre grelot, là, et vos chaussures qui couinent sur le…AAAH ! LE SOL ! VOS CHAUSSURES !
 La réprimande sèche se transforme en hurlement d’horreur sitôt que mon interlocuteur lève les yeux pour les poser sur les traces boueuses qui accompagnent chacun de mes pas. J’ai une grimace gênée en me rendant compte, d’un coup d’œil par-dessus mon épaule, de l’ampleur de la traînée que j’ai laissée.
 — Hum… Je suis désolé. Je vais nettoyer ! Mais savez-vous si je peux trouver ici une…
 — Allez-vous-en ! Oust ! Cet opéra a un standing, ce n’est pas un endroit pour les vagabonds crasseux, allez faire la charité ailleurs !
 — Un vagabond crasseux ?
 L’appellation me vexe. Je n’ai plus envie de lui demander la moindre information, ni mon chemin, ni s’il a vu la danseuse, encore la permission de quoi que ce soit, d’autant plus vu l’agressivité grandissante avec laquelle il me parle.
 — Si vous me le permettez…
 Je bifurque vers les escaliers alors qu’il se lève derrière son comptoir et son visage devient plus écarlate encore.
 — Où est-ce que vous croyez aller comme ça ?! La… la salle de spectacle est réservée aux personnes honorables qui ont payé leur billet ! Revenez ici ! Revenez ici, je vous dis !
 Je m’élance à l’assaut des marches, les avalant quatre par quatre alors que je l’entends s’époumoner de plus en plus fort derrière moi.
 — Sécurité ! Sé-cu-ri-té ! 
 Sans attendre que cette dernière vienne lui prêter main forte, je l’entends se lancer à ma poursuite, ses chaussures, sans doute bien plus propres que les miennes, claquant sur le marbre. N’ayant envie de me confronter ni à lui, ni à la fameuse sécurité, j’accélère encore. Je trébuche sur le tapis sur le palier en haut, tombe sur la poignée plus que je ne l’attrape, et, sous ses cris catastrophés, pousse.

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Un commentaire

  1. Lev

    Les salles de spectacles appartiennent à tout le monde, boue comprise !! À bas le système !! Pièce très dynamique et fun ! Je remarque que beaucoup de nos pièces récentes présentent ou évoquent des hommes en uniforme – sécurité, contrôleurs RATP… Seraient-il liés ?

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