Tout au bout du bord de l’extrême, derrière les dernières montagnes du Monde, s’élève le Château des 100 000 pièces Les murailles, et les tours et les étages de ce palais s’élèvent, à ce qu’il vous paraît, bien au-delà des nuages, au-dessus des cimes.
LA PIÈCE ASSEZ ÉTRANGE
LA PIÈCE ASSEZ ÉTRANGE

LA PIÈCE ASSEZ ÉTRANGE

Pièce n°843

Miss Lovegood as Miss Lovegood

Vraiment, cet endroit était étrange. J’avais l’impression qu’une mystérieuse personne s’amusait à nous mettre dans la plus impossible des situations. Je ne pouvais même plus faire confiance à mes yeux, eux-aussi complètement perdus, troublés. Finalement, cela me fit un peu peur. Même l’esprit réfléchi de Caliorynthe n’était d’aucune utilité dans cette pièce. Om, lui, voulait sortir au plus vite de cet endroit, mais ce n’était pas nous qui en décidions.
Nous entrâmes, soulagés d’avoir réussi à éviter les serveurs -et surtout leur abominable mixture. Imaginez ce qu’il serait arrivé s’ils nous avaient surpris à essayer de le fausser compagnie ? Nous aurions été obligés de boire leur préparation ! J’ai la fumée tout hérissée, rien qu’à cette idée.
Nous étions donc entrés dans cette pièce, si terrible que j’ose à peine y repenser aujourd’hui. Autour de nous, il n’y avait rien. Seulement du blanc, très lumineux, comme celui présent dans la pièce aux visages. Je n’arrivai pas à distinguer des murs, un plafond ni même un sol. Nous avançâmes. Nous marchâmes pendant très longtemps.
-Euh… ça vous dirait de faire une pause ? proposai-je. Histoire de réfléchir un peu. On ne peut pas avancer éternellement.
Mes deux amis ne réagirent pas.
-Youhou ! dis-je, trop étonné pour prononcer quelque chose de plus recherché
Une fois encore, mes compagnons d’aventure n’eurent aucune réaction. Je voulu donner une petite tape dans le dos de Caliorynthe. Mais, au moment où ma main aurait dû rentrer en contact avec le dos de mon amie, elle disparut. À vrai dire, je ne sais pas avec exactitude ce qui s’évapora. Ma main ? Caliorynthe ?
Non, mon amie était toujours là… mais elle avait pourtant disparu…
Je ne comprenais rien. Que se passait-il ? Caliorynthe et Om apparaissaient par moments, puis disparaissaient. C’était comme s’ils n’étaient que des ombres, des souvenirs ou quelque chose de ce genre. Je décidai de continuer de marcher. S’arrêter ici ne serait d’aucune utilité. Une horloge apparut au-dessus de nos têtes, comme par magie. Elle indiquait trois heures. Nous continuâmes de marcher, tous les trois en rythme. Au bout d’un moment, je commençai à m’ennuyer, seul, sans personne à qui parler. Je regardai de nouveau la pendule. Oh non ! L’aiguille n’avait pas bougé d’un pouce. Je m’arrêtai pour l’observer. La trotteuse se mit alors en marche. Je fis un pas. Elle se figea immédiatement. Je m’immobilisai de nouveau. Peut-être que cette horloge était la clef pour sortir de ce couloir blanc ? L’aiguille commença une course effrénée, deux fois plus rapide que la normale. Des tâches de sang apparurent sur le blanc, qui se colora au fur et à mesure en rouge. La trotteuse accéléra encore. Pendant qu’elle parcourait le cadran, un escalier se forma sous nos pieds. À six heures pile, l’aiguille s’arrêta. Nous restâmes un instant immobiles, puis Caliorynthe et Om dévalèrent les marches de l’escalier. Je les suivi. Nous arrivâmes sur une petite plate-forme puis continuâmes notre chemin. Nous traversâmes trois paliers, tous identiques. L’escalier lui-aussi était parfaitement régulier : vingt marches, une plate-forme, vingt marches, une plate-forme…
En arrivant sur la quatrième, je m’arrêtai net : l’horloge avait réapparu. Les aiguilles n’avaient pas bougé, stoppées dans leur course folle. Je regardai alors l’escalier. Et je compris. Nous venions de descendre 80 marches et pourtant, nous étions revenus sur la première plate-forme. Cet escalier rectangulaire n’avait pas de fin. Tout comme le couloir blanc.
Ce fut Caliorynthe qui trouva la solution. Elle enjamba la rambarde et sauta dans le vide. Je fis comme elle, même si j’appréhendais un peu l’atterrissage. Hélas, c’était bien ce que je craignais. Pendant de très longues heures, nous restâmes en lévitation. Oui, car finalement, je ne suis pas certain que nous chutions véritablement.
Cette fois, c’est Om qui trouva la solution.
-Tic, tac, tic, tac, tic, tac, cria-t-il
Mais bien sûr ! La pendule était restée sur l’escalier, mais rien ne nous interdisait de l’imiter ! Ma voix rejoignit celle d’Om et celle de Caliorynthe.
L’atterrissage fut très doux et agréable. Mes pieds se posèrent simplement sur une moquette bleue. Je regardai devant moi. Des lettres tournaient, tourbillonnaient en formant un grand cercle et en se dispersant parfois. À côté d’elle, je vis six cases vides. Que fallait-il faire ? Caliorynthe trouva la réponse en première : elle attrapa une des lettres -un I- et l’enferma dans la première case. Il se débattit, cogna contre les parois, mais ne parvint pas à s’échapper. Om saisit un N et le rangea à côté du I. Je pris alors un G et le mis dans la troisième case. Mes amis terminèrent en mettant un U et un L dans les deux espaces restants.
Je ne crois pas que ce fut une bonne idée. Au moment où Om referma la dernière case, tout disparu. Je recommençai à crier, quand une brume grise enveloppa le paysage lilial. Comme c’était curieux, tous ces changements de couleur. Je distinguai alors une petite phrase, écrite en lambeaux de fumée bleue : Est-ce un vase ou deux visages ? Une image se forma en-dessous. La question était toute simple : le dessin représentait un vase. Des volutes de fumée surgirent à côté de moi. J’essayai de les prendre dans mes mains. Je tortillai la fumée jusqu’à ce qu’elle forme le mot « vase ». Je regardai de nouveau l’image, pour vérifier ma réponse. Oh non ! Ce n’est pas possible ! Le dessin avait changé, on pouvait à présent y voir deux visages, face à face. Mais… le vase était toujours là, au milieu des deux personnages. Les deux images se superposaient. Ou plutôt, l’une était faite de l’autre. Mais quelle était la bonne réponse, dans ce cas ? Je n’avais pas assez de fumée pour écrire les deux mots. J’optai pour « visages » puisque qu’il contenait les quatre lettres de « vase ».
La brume se dissipa et je pus distinguer une lumière rougeâtre au lointain. Je marchai vers elle. Cette route n’avait sûrement pas de fin, mais je ne savais que faire d’autre. J’entendis des pas derrière moi. Caliorynthe ! Je la vis avancer elle-aussi vers ce soleil couchant. Om arriva également. Cette fois encore, je ne parvins pas à les voir réellement, mais qu’importe, leur présence suffisait. Une nouvelle énigme apparut. : «Calculez. Sachant que le résultat ne peut être que positif.» La consigne s’effaça pour laisser aux chiffres : « 3 – 9 ». Voilà ce qui était marqué. Je n’ai jamais été particulièrement brillant en calculs, mais je pouvais tout de même deviner que le résultat était négatif. Et pourtant, la consigne l’interdisait. La pendule apparut alors, et son tic-tac incessant m’empêchait de me concentrer. Finalement, je décidai d’abandonner ce calcul impossible. Caliorynthe s’approcha des chiffres, tourna le « neuf » et mit le « moins » devant lui. Elle venait d’inscrire le résultat. L’horloge accéléra encore, puis une gigantesque explosion retentit.
Je me réveillai, allongé par terre. Je m’aperçus alors que je portais un casque et des genouillères. Une balle était posée à côté de moi. Je sus immédiatement ce qu’il fallait faire. Je pris le ballon et le lançai le plus loin possible. Oui, c’était cela, la consigne. Faire disparaître la balle. Rien de plus simple ! Je venais de réussir. Mais je remarquai alors qu’une autre balle identique à la première avait apparu. Je la lançai. Cette fois encore, une autre similaire avait pris la place de la deuxième. Encore un manège sans fin. Je fis rouler la nouvelle balle, puis la suivante. Toutes disparaissaient pour laisser place à leur jumelle. Que pouvais-je faire ? J’eus alors une idée. J’ouvris le sac qui contenait nos affaires, pris le poignard de Caliorynthe et transperçai le ballon. Des gouttelettes de sang tachèrent les bords (à défaut de murs et de plafonds) de la pièce. Puis, tout disparut dans un grand fracas.

-Merci à vous deux, dit une voix
-Caliorynthe ? demandai-je
-Esprit ! Je voulais te remercier pour avoir trouvé le moyen pour s’échapper de l’escalier sans fin.
-Mais non, c’est toi qui as sauté la première ! m’exclamai-je
-Ce n’est pas vrai, je n’ai rien fait. Je vous ai juste suivis.
-C’est toi qui as inscris le résultat du calcul !
-Mais… c’est Om qui l’a écrit… je ne comprends pas…
Après avoir longuement discuté, il semblerait que chacun ait eu une vision différente de cette étrange pièce.

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