Pièce n°1818
Écrite par Allyss Obsidienne
Je suis Carlynn Vagamova. Je suis Carlynn Vagamova. Je suis Carlynn Vagamova. C’est ce dont j’essaie désespérément de me convaincre, prostrée dans un coin de la pièce ; peut-être qu’à force de le répéter, je saurai de nouveau y croire.
Je n’ai pas eu le choix. Je n’ai pas choisi d’entrer ici, je ne l’ai pas voulu, si j’avais pu fuir cet endroit comme la peste et ne plus jamais revoir l’ombre de ses tours tordues et ricanantes, je l’aurais fait dans l’instant. Je suis entrée car je n’avais plus de chez-moi, plus personne sur qui compter… Cette structure était la seule trace de vie intelligente que j’avais pu croiser depuis mon exil. Je pensais qu’en y entrant, je serais enfin en sécurité. Je pourrais faire mon deuil, refaire ma vie, oublier mes malheurs. Comme je fus naïve…
Je suis Carlynn Vagamova et j’ai vu mon monde s’effondrer. Tous mes espoirs annihilés. Chaque pièce que j’ai traversée, du Cathedrhall à la prison de l’Étoile, a son lot de pièges et de secrets. Je n’ai rien vu d’aussi inhospitalier que ce lieu. Même la pièce dans laquelle je suis actuellement ne m’inspire aucune confiance, malgré les victuailles qui sont disposées sur l’immense table tout en marbre. Pourtant, elles dégagent une odeur fort appétissante, mais rien ne me tente. Je sais qu’il faudrait que je me nourrisse, que je prenne des forces, parce que rien ici ne le fera à ma place. Mais comment manger, quand on sait que tous ceux que l’on a connus ne le feront plus jamais ? Comment continuer de vivre quand on sait que là-haut, des étoiles souffrent ?
Mes larmes redoublent et mes sanglots résonnent dans l’immense salle de banquet. Je me force à me lever. Mes pieds glissent sur le carrelage sombre mais je me rattrape au mur lambrissé avant de chuter. Je dois avoir l’air pitoyable. Carlynn Vagamova, en loques, réduite à se tenir au mur pour marcher à peu près correctement… S’ils étaient encore en vie, mes ennemis se gausseraient de moi. Si quelqu’un me voyait en cet instant, il ne croirait jamais qu’il a devant lui l’authentique reine de Vega.
Peut-être est-ce pour cela que j’ai tant de mal à me rappeler qui je suis. Mon identité s’évanouit au fur et à mesure que je prends conscience de la disparition de mon monde. La texture des carottes sous mes dents a beau être bien présente, leur goût, lui, ne me dit rien. Pas plus que celui de la purée de navets arrosée de jus de viande. Tout semble identique mais tout est différent. Je crois savoir qui je suis, sauf que je serais incapable de me reconnaître dans un miroir…
Parce qu’on m’a tout pris. Ma famille, mes amis, ma terre d’accueil. Parce que je n’ai pas eu de meilleure idée que de me réfugier dans les bras de celui qui m’a volé mon Étoile. Mais ne t’inquiète pas, petit Château. Je me vengerai.
Alors j’engouffre toute la nourriture se trouvant à portée de main.
Un banquet à base de carottes râpées, quel scandale !
Tu t’empares de la première personne du singulier avec une vraie puissance, c’est admirable. D’autant plus curieux de voir comment ta pièce s’agence avec la suivante de Didou : assister à la déliquescence du monde… pour sa plus grande peine ou son plus grand plaisir.
J’ai adoré ta pièce. Ton personnage surtout. Ça donne tellement envie de découvrir son passé. Surtout qu’elle n’a pas cessé de me surprendre. Au début je pensais qu’elle était un peu faible, perdue. Et puis là, pouf, elle annonce que tous ses ennemis sont morts. Par sa faute ? En tout cas, ça lui a donné une sacrée aura dans mon esprit ^^